Après un premier article consacré à l’entrée du port, Jospeh Morlent poursuit sa visite commentée du Havre avec le Bassin du commerce.
Nous avons dit que le commerce avait fait au génie militaire une première guerre dont il était sorti vainqueur ; vous avez sous les yeux sa conquête : c’est un vaste bassin qui porte le nom du conquérant, Bassin du Commerce. Jamais emplacement ne fut mieux choisi pour élever un trophée, et cette mer artificielle est sans contredit le plus beau point de vue du Havre, et peut-être de toute la France centrale ou maritime. C’est du foyer de la salle du spectacle qu’on peut jouir de sa magnificence et mesurer son étendue ; d’abord les regards se reposent à droite et à gauche sur deux bouquets d’arbres auxquels semblent faire suite une double avenue de navires placés sur un triple ou quadruple rang formant, avec les eaux du bassin qui paraissent s’élever à leur extrémité, la plus admirable perspective ; puis ils se promènent avec complaisance sur les quais et sur les édifices élégans [sic] et modernes qui en ornent les bords.
Il est fâcheux toutefois que la mâture plantée disgracieusement à l’extrémité occidentale de cette vaste retenue contrarie par sa forme inharmonieuse l’ensemble de ce tableau imposant et grandiose ; mais combien il emprunte de charme et de magie aux beaux jours des fêtes nationales ou religieuses, lorsque chacune de ces machines flottantes se pare avec coquetterie de ses pavois aux mille couleurs, et qu’elle déploie sur son beaupré, avec une fierté toute patriotique, le pavillon qui la protège.
Surveillant incommode aux contrebandiers politiques et mercantiles, que le Rôdeur, petit cutter de l’État, chargé d’inspecter la rade et la côte, fasse trêve à ses courses littorales pour venir étaler sur ce bassin, au milieu de nos pacifiques bâtimens [sic] de commerce, le luxe de ses pavillons et l’éclat de ses batteries, et vous verrez, au bruit retentissant du canon, à cette fumée blanchâtre qui se déroule en tourbillons à travers les mâts et les cordages, vous verrez accourir et se presser tous ceux qui se plaisent et s’émeuvent à de pareilles fêtes, c’est-à-dire la population du Havre tout entière.
Texte extrait de l’ouvrage Souvenirs Pittoresque du Havre et de ses environs (TOUR138)
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