Londres, 28 mars 1789.
Les mésaventures du Franc-Maçon, navire négrier
Le Franc-Maçon est un navire de 135 tonneaux, appartenant à l’armement havrais Louis Le Grand, commandé par le capitaine Cuisso. Armé pour une expédition de traite*, il appareille le 21 mai 1787 du Havre à destination de l’Afrique qu’il touche 2 mois plus tard. Arrivé à l’embouchure du fleuve Gabon, le navire mouille au large, au milieu d’autres bateaux négriers*. Au cours des 8 mois d’escale, le capitaine Cuisso rend plusieurs visites au roi noir qui commande une chefferie* où les « chasseurs » africains viennent régulièrement de l’intérieur des terres avec des captifs*. Le 10 avril 1788, quelques esclaves*, déjà à bord, parviennent à se déferrer. S’étant libérés de leurs entraves, ils montent sur le pont, prennent par surprise 4 matelots et le capitaine Cuisso qu’ils tuent. Plusieurs hommes d’équipage, grimpés dans la mâture, parviennent toutefois à sauter à l’eau. Ils sont recueillis par le navire négrier* français L’Abracadabra, alors en cours d’appareillage pour traverser l’Atlantique avec son chargement d’esclaves*.
Quels sont les risques liés aux expéditions de commerce triangulaire ? Les révoltés ne parviennent pas à manoeuvrer Le Franc-Maçon qui s’échoue sur un banc de vase. Aussitôt, Grass, autre roi local, envoie ses guerriers capturer les esclaves*. Ceux-ci sont à nouveau vendus, tout comme Le Franc-Maçon lui-même, à Wemsley, capitaine anglais. Wemsley sait que cette transaction est illégale, puisque le bateau est toujours la propriété de l’armateur* Le Grand. Il fait donc conduire le navire à Bristol en Angleterre pour le maquiller. Mais un ami de Louis Le Grand se trouvant à Bristol reconnaît Le Franc-Maçon et contacte l’Ambassade de France en Angleterre. Lorsque L’Abracadabra revient au Havre après son périple par les Antilles, le 13 février 1789, les rescapés du Franc-Maçon content leurs mésaventures au commandant de la Marine au Havre. Ces rapports servent de pièces pour la constitution du dossier de réclamation de l’Ambassade de France en Angleterre. Toutefois, les événements révolutionnaires du printemps 1789 viennent perturber les suites judiciaires de l’affaire. Faute d’avoir pu retrouver les archives de l’époque nous ne savons si l’armateur* Le Grand est parvenu à se faire restituer son navire.
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